Murmures
--> Merci Songe...
Les battements de mon coeur ce sont fait murmures devant l'imposant édifice de pierre détruit par le souffle des années, par des vents destructeurs qui soupirent lentement, assidûment sur les souvenirs, n'en laissant plus que des traces vacillantes, essoufflées dans ma mémoire. Je cherche à me replonger dans cette ambiance spirituelle, vertigineuse où mon souffle de vie s'est tu pour la première fois, lors de la pose de la première pierre. Tant de temps a passé, ma foi a été ébranlée par les évènements d'une vie. Tout ce que j'ai pu croire en ces instants reculés me semble si vague, un vestige de jeunesse, d'une adolescence pâle, où je ne m'appartenais pas moi même, consumée que j'étais par un fanatisme vibrant. J'imposais à mes genoux la meurtrissure du froid sur le sol glacé et dur de la chapelle, dans le silence pesant d'un ciel trop élevé pour les hommes, frémissante de béatitude dans la prière, dans le jeûne auquel j'astreignais ce corps trop maigre et délicat qui m'était fardeau de chairs sacrilèges, si frêle, à peine sorti des douceurs de l'enfance. Je ne voyais mon âme que transfigurée par la sainteté, image humaine de la perfection voulue par le Seigneur. Il me fallait endurer tous les maux afin d'irradier mon âme de pureté, faire pénitence pour les pêchés de tous, m'offrir toute entière, m'emmurer dans la pénitence et la contemplation de Dieu ; faire de mon corps, ma chair, cette peau sur mes os, une ébauche à la sainteté, un martyr à l'hégémonie de Dieu. Que dire aujourd'hui ? Que les souvenirs et les traces sont encore sourdement imprimées sous mon épiderme, que mon âme se débat encore dans les ténèbres, affligée d'écorchures, affaiblie par la prière et par trop d'années silencieuses, meurtrie par mes sacrifices, par l'aliénation volontaire de mon enfance. Je voulais rester pour toujours et pour tous l'innocence incarnée et suppliciée derrière des barreaux de fer.
Était-ce pur égoïsme ou pure inconscience ? Je n'ai jamais douté de Dieu, mais j'ai douté de moi et ma volonté a fléchi, grappillée progressivement par une autre force qui m'était jusqu'alors inconnue. Je me suis laissée dévorer toute entière par l'instinct maternel. Dieu avait pris une place si infime dans mon coeur trop plein de cet amour insaisissable, que l'angoisse et une douleur pire encore que tous les maux précédents m'ont assaillie. J'étais le creuset de toutes les peurs, de tous les affres. Cet avenir si hasardeux que j'allais lui laisser, le déchirement de la séparation dépassaient en intensité tous ces mois de privations. J'avais atteint le paroxysme de la terreur dans la crainte qu'on m'enlevât mon enfant, qu'il meure de mes errances chrétiennes, de ma sainteté égarée, toute hérétique que je devenais pour protéger ma chair.
À cet instant, dans le froid mordant, face aux ruines de ma vie, tout me revenait en saccades émotionnelles. J'ai du m'arrêter pour reprendre mon souffle fuyant et oser lever les yeux vers ce ciel dont je fus privé si longtemps et qui me semble être encore aujourd'hui comme un trop grand bonheur, grandement immérité. Le souvenir allait me tuer. J'avais résisté à tant de mes morts et prié pour tant d'âmes que je n'avais plus la moindre vertu en mon coeur. Tous ces mots qui m'ont emplis durant toutes ces années, ces pêchés clairement avoués, cette humanité grouillante et souillée, ont fini par me gorger de violence, m'imprégner d'amertume. Je suis morte dans ce tombeau quand il m'a été arraché des mains, mon fils, ma chair. J'ai tant griffé les murs, tant lacéré ma peau, je cherche encore des traces mais je ne vois plus rien, je n'entends plus que des murmures, les murmures d'un temps révolu où l'on consacrait la douleur, où on l'élevait au titre de salut.
Était-ce pur égoïsme ou pure inconscience ? Je n'ai jamais douté de Dieu, mais j'ai douté de moi et ma volonté a fléchi, grappillée progressivement par une autre force qui m'était jusqu'alors inconnue. Je me suis laissée dévorer toute entière par l'instinct maternel. Dieu avait pris une place si infime dans mon coeur trop plein de cet amour insaisissable, que l'angoisse et une douleur pire encore que tous les maux précédents m'ont assaillie. J'étais le creuset de toutes les peurs, de tous les affres. Cet avenir si hasardeux que j'allais lui laisser, le déchirement de la séparation dépassaient en intensité tous ces mois de privations. J'avais atteint le paroxysme de la terreur dans la crainte qu'on m'enlevât mon enfant, qu'il meure de mes errances chrétiennes, de ma sainteté égarée, toute hérétique que je devenais pour protéger ma chair.
À cet instant, dans le froid mordant, face aux ruines de ma vie, tout me revenait en saccades émotionnelles. J'ai du m'arrêter pour reprendre mon souffle fuyant et oser lever les yeux vers ce ciel dont je fus privé si longtemps et qui me semble être encore aujourd'hui comme un trop grand bonheur, grandement immérité. Le souvenir allait me tuer. J'avais résisté à tant de mes morts et prié pour tant d'âmes que je n'avais plus la moindre vertu en mon coeur. Tous ces mots qui m'ont emplis durant toutes ces années, ces pêchés clairement avoués, cette humanité grouillante et souillée, ont fini par me gorger de violence, m'imprégner d'amertume. Je suis morte dans ce tombeau quand il m'a été arraché des mains, mon fils, ma chair. J'ai tant griffé les murs, tant lacéré ma peau, je cherche encore des traces mais je ne vois plus rien, je n'entends plus que des murmures, les murmures d'un temps révolu où l'on consacrait la douleur, où on l'élevait au titre de salut.
Commentaires :
J'ai cherché à retranscrire le style et le siècle, les sentiments confus, la peur, l'angoisse et le côté oppressant de la situation, un autre âge en somme. La transcendance, la spiritualité, les doutes, l'échec, les remords, le temps qui passe.
Art-Orange-2004
Lililou revient !